Chère Diane,
J’ai l’impression d’organiser mes visites en journées thématiques. Les artistes rencontrés aujourd’hui ont en commun de travailler avec des matériaux immatériels, le son, la lumière, la chaleur, le texte, la performance, le temps… qui prennent corps de manière différentes.
Brice Jeannin, artiste plasticien et enseignant à la HEAR (Haute école d’Art du Rhin, département SONIC), s’intéresse au déploiement spatial du son. Le matériau sonore est toujours abordé avec une relative simplicité, évitant l’écueil de la technicité pour privilégier une écoute attentive du quotidien qui sera ensuite traduit en signaux. Le son est modulé au même titre que sont sculptés les volumes géométriques qui lui servent de réceptacle ou de caisse de résonance. Le duo d’artistes Lingjie Wang et Jingfang Hao ont une approche sensible du quotidien semblable à celle de Brice, sauf que leur matériau de prédilection est la lumière, et leur outil, le temps qui passe. Tous les jours, ils font s’écrire les rayons du soleil sur des feuilles de papier thermosensibles, collectent du pollen, exécutent des gestes minutieux répétitifs, inscrivent leurs œuvres dans le mouvement cyclique – la spirale? – du temps. Julien Maillard quant à lui se donne des défis performatifs tels que surveiller une zone portuaire jour et nuit pendant une semaine ou sculpter son corps comme un culturiste pendant 3 mois d’entrainement intense – tout en tordant les notions de réel et de fiction via l’échec et l’absurdité de ses actions. Son œuvre cherche encore à s’incarner, l’écriture semblant être la forme la plus évidente – puis qu’évoluant dans cette zone d’ombre entre réel et fiction et qu’il la pratique, mais pas encore comme moyen de transmission de ses performances.
Dans toutes les pratiques immatérielles, sensorielles, sensibles se pose cette question de la forme finale… et du dictat des installations qui « ressemblent à de l’art contemporain ».